MIRACLE À SANTA-ANNA
(Miracle at Santa Anna – 2007) Date de sortie : indéterminée.
Réalisé par
Spike LeeÉcrit par
James McBrideMusique de
Terence BlanchardAvec
Derek Luke, Pierfrancesco Favino, Michael Ealy, Omar Benson Miller, Joseph Gordon-Levitt, Omero Antonutti, Valentina Cervi, Matteo Sciabardi, Lydia Biondi, Sergio Albelli, James GandolfiniInside Man n’était malheureusement pas une erreur de parcours :
Spike Lee est bel et bien en train de perdre son génie d’antan. Alors que le cinéaste signait l’un de ses plus beaux métrages il y a quelques années (
La 25e Heure), ses récents travaux témoignent d’une sérieuse absence de créativité et d’investissement personnel, un peu à la manière de
Shyamalan sur
The Happening. Et
Miracle à Santa-Anna ne saurait témoigner du contraire ! Pourtant, le concept laissait présager un retour aux sources pour le réalisateur de
Malcolm X :
Miracle à Santa-Anna conte en effet le parcours (véridique, dit-on) d’une poignée de soldats Afro-Américains, perdus en pleine campagne italienne pendant la Seconde Guerre Mondiale, puis cachés par la population locale.
Avec un synopsis pareil, d’aucuns étaient en droit d’attendre un message fort sur la participation des combattants Noirs au front (à l’image d’
Indigènes)... Mais
Spike Lee n’en fait rien et, avec la complicité du scénariste, le cinéaste préfère s’attarder (longuement !) sur les relations entre les divers protagonistes. Du coup, les personnages gagnent en crédibilité et en personnalité (les nazis caricaturaux exceptés) ce que le récit perd en attrait et en rythme (rappelons que le film atteint les 2h30 !). Et des problèmes de rythme, il y en a à la pelle dans
Miracle à Santa-Anna.
Spike Lee et
James McBride usent de tant de détours, de longueurs et de lenteurs pour aboutir à leur dénouement que le spectateur se lasse très vite de l’intrigue.
D’autant que la mise en scène de
Lee s’avère discutable lorsqu’il s’agit de filmer les combats sur le front – l’ensemble manquant de ferveur et de style.
Spike Lee cherchait visiblement à croiser
Il Faut Sauver le Soldat Ryan et
Apocalypse Now, mais le maigre talent qu’il injecte à son métrage est loin de taquiner le génie de
Spielberg ou
Coppola. Et tandis que le spectacle du
Soldat Ryan s’accueillait comme un choc visuel et psychologique sans précédent, celui de
Santa Anna donne plus l’impression de faire dans la violence gratuite, de miser sur la surenchère dans le seul dessein d’obtenir le même impact que l’œuvre de
Spielberg. Certes,
Spike Lee parvient, de temps à autre, à émouvoir ou faire trembler son public (l’exécution du nouveau-né est à la limite du supportable) mais il est clair que le film de guerre n’est pas le domaine de prédilection du réalisateur.
D’ailleurs, il n’est pas étonnant de constater que les passages les plus intéressants de
Miracle à Santa-Anna sont ceux qui se déroulent en 1984 (la scène-choc d’ouverture et l’épilogue, donc). Dommage pour le spectateur puisque ces séquences – les seules à bénéficier du sceau artistique du cinéaste, soit dit en passant – ne couvrent que 20 minutes du métrage. Sur plus de 2h30, inutile de préciser que l’on ressort fortement déçu du dernier Spike Lee. Reste un lot de scènes drôles, un cameo sympathique de
John Leguizamo, ainsi qu’une galerie de comédiens irréprochables. En particulier,
Omar Benson Miller (dont le talent n’était qu’esquissé dans
8 Mile) et
Matteo Sciabordi, un jeune acteur touchant, juste, surprenant dans la peau de garçon encore perdu dans ses rêveries infantiles.
Mais, en définitive,
Miracle à Santa-Anna ne remplit pas convenablement le cahier des charges et le public n’adhère pas vraiment. Espérons seulement que
Spike Lee saura tenir compte des critiques émises lors de la présentation du film aux Festivals de Deauville et Toronto pour revoir sa copie. Et surtout espérons qu’il se demandera à quoi
Miracle à Santa-Anna aurait ressembler s’il l’avait réalisé quelques années plus tôt... Sans l’influence de
Spielberg, sans flemme créative, et avec toute sa détermination.
NOTE : 11/20